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 Le souffle divin.

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Marchesable sans racines
Solal Or-des-Temps
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Marchesable sans racines

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MessageSujet: Le souffle divin.   Le souffle divin. Icon_minitime20/2/2015, 22:08

LE SOUFFLE DIVIN
31EME  JOUR DE L'AUTOMNE 1650



Chantier aux abords des terres sauvages d'Ileglace.
Future grande demeure d'un éleveur de lampagas.


Gérald devait assurer la sécurité de tous les charpentiers et cachait le fait qu’il y avait reçu des ordres pour faire des économies sur l’équipement. Il n’appréciait pas le nouveau qui répétait à longueur de journée qu’un jour les cordes céderaient et que les « attaches » se briseraient car elles se déformaient en les touchant. Il se disait montagnard et qu’il avait grimpé pas mal dans sa jeunesse, donc il savait ce qu’il disait. N’importe quoi ! Depuis quand un mésorian correct se prenait pour un okanaki ?
Gérald appréciait la compagnie d’une certaine Livia, mais Livia aimait bien entendre les contes du nouveau et les musiques d’un apprenti. Il estima alors que ces économies allaient un jour où l’autre lui servir. Il espérait que ces deux rustres allaient se briser le cou.  Ainsi, Livia ne serait rien qu’à lui. Ah oui ! Gérald avait bien aimé cette matinée où cet imbécile de Warren essaya de sauver l’apprenti pour finir sur le sol, le corps cassé par une poutre. Adieu le nouveau !

Cet accident ne dura qu’une poignée de secondes et pourtant Warren crut que toute une vie venait de s’écrouler. A croire qu’une foule de pensées contradictoires pouvaient être plus rapide qu’un cheval au galop.

****

*J’ai des gens qui m’aiment et qui m’attendent. Je dois lui dire que je ne veux pas être séparé d’elle. Je dois lui dire que je l’aime. Je demande de vivre. Je demande d’être l’homme que je dois être vraiment. Je demande de changer. Je veux vivre. Je…*

Oui ! Les épreuves que l’on croyait insurmontables, avec le temps, ne le sont plus. Oui ! Il venait de penser à ce qu’il avait de plus cher, à cette île qui venait tout lui offrir, à tout, sauf à ce qu’il n’avait pas.
Il n’avait pas pensé, plus tôt, à ses parents trop lâches pour l’élever, de sa femme qui mourut de chagrin à la mort de leur fils, de ces autres qui sont partis… Non, tout ce qu’il avait pensé était à ce qu’il avait et pas le contraire. Il y avait donc une lumière au bout du tunnel. Il ne pouvait que survivre à cette chute, il y croyait fermement. Il tenta même de prendre une position pour ne pas se faire de mal (ce qui en somme était parfaitement illogique et impossible). Ce geste symbolique fut pourtant la clef qui lui permit de passer un bon coup de balais sur tout ce passé. Cela lui semblait tellement évident de ressentir ça, en ce moment même.

C’est à ce moment-là qu’il se rendit compte qu’il y avait une très nette différence entre l’esprit et le corps. Car en vérité, s’il se sentait soulagé de toute cette souffrance accumulée depuis des années, de toute cette rancœur envers des personnes qui devaient certainement ne pas l’attendre pour vivre, enfin, il se sentit neuf.

****

Le corps, une fois au sol, lui montrait qu’il avait besoin d’aide. Ses oreilles se noyaient dans un brouhaha insupportable. Il ressentait la panique des ouvriers, des mains qui le clouaient au sol et un goût désagréable sur ses lèvres. Le chantier se mit à tourner pour lui donner une forte nausée. Il voulait de la paix. Il n’avait pas mal. En preuve, il chassa toutes ces mains, s’assit, vomit et s’écroula.

Vingt-deux heures après.

Le blessé se réveilla dans un lit avec deux bassines vides sur une table de chevet. Ses orteils et doigts bougeaient, sa jambe gauche portait une attelle de fortune, la droite était pansée, son épaule gauche avait un bandage qui immobilisait son bras… mais cela n’était en rien comparé à son dos. Si douloureux que Warren ne pouvait pas la décrire. Elle était la pire douleur de sa vie, si puissante qu’elle éclipsait toutes les autres. Il fut incapable de bouger sans être prit par de violents vertiges et quand il vomissait, cela devenait une séance de torture.

Tout ce qu’il pouvait faire était de rester immobile et d’attendre les soins d’une prêtresse.

Quelques heures plus tard.

A l’écoute de son corps, il refusait de manger mais pas de boire de l’eau. Il vomissait beaucoup. Son teint était livide. Sa chambre avait la porte constamment ouverte. Une fois, il entendit des bribes de conversations sur lui. Pour le peu qu’il comprit, le patron voulait qu’il meure rapidement parce qu’il venait de trouver un bon prix pour un embaumement et que ça coûtait moins cher que vider des seaux. Il y avait même des paris sur les jours qui lui restaient à vivre. Ceci le mit tant en colère qu’il hurla de toutes ses forces avant de s’évanouir :

« Le patron peut se foutre son embaumement au cul, oui ! J’ai besoin une prêtresse bordel ! Où je vais le mettre dans une merde qu’il va pouvoir en graisser des tartines pendant une décade. Et vous aussi par-dessus le marché ! »

Il ignorait alors que prêt de lui, il y avait un jeune homme redevable pour son acte de courage. Cet apprenti, rongé par la culpabilité de s'en être sorti indemne, n'avait pas osé lui rendre visite plus tôt. Refusant qu'on le laisse mourir et voyant qu'aucun ouvrier ne bougeait le petit doigt, cet enfant du village décida alors de trouver lui-même une prêtresse. Ne serait-ce pour payer sa dette. Il devait faire vite car le temps était compté.

✻✻✻
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