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| Entre flux et grands lacs [Manaki] | |
| Auteur | Message |
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| Sujet: Entre flux et grands lacs [Manaki] 13/11/2015, 13:01 | |
| Entre flux et grands lacs - FÊTE DES FLUX - 1er jour de printemps 1649 - Grands lacs - Îleglace Il n'était pas fréquent que la guérisseuse du clan Mauste, Wakanda Main-des-Dieux, s'éloigne du clan, en raison de sa fonction des plus importantes. Mais en cette fin d'hivers 1648 l'un des clan allié au Mauste, le clan Tatati, avait expressément demandé son aide car leur propre guérisseuse été tombée malade ainsi que la moitié du clan. Wakanda avait donc accepté de se déplacer jusque dans les îles du nord pour endiguer l’épidémie. Accompagnée par sa fille Tiki qui lui servait "d'escorte", elle été venue partager son savoir et fort heureusement cela avait payé car le clan Tatati se remettait très bien. L'hivers avait progressé et la fête des flux qui marquait le premier jour de année 1649 arriva à grand pas. Les deux Mauste avait été invitée à partager cette festivité avec le Clan Tatati qui avait pour coutume de se rendre au Totem des grands lac pour l'occasion. Elles n'avaient pas refusé l'offre. C'était peut-être l'occasion de rencontrer d'autres clans et d'amorcer des nouvelles alliances. Le clan s'était mis en marche plusieurs jours en avancent pour atteindre la destination à temps. Arrivés sur place, les membres purent constater que d'autres clans était déjà là. C'était l'effervescence ! Et malgré les températures toujours peu clémentes de l'endroit en ce premier jour del'année, tout le monde semblait très content d'être là. Comme le voulait la tradition, on s'était peint de motifs qui devaient représenter les flux de la Déesse. Pour Tiki, c'était la seule fois de l'année ou elle acceptait et aimait se faire maquiller par sa mère. Bien que par rapport à d'autres, les motifs faciaux qu'elle arboraient était bien plus discrets : Deux spirales lui coulaient le long des joues pour se finir sur le coin des lèvres. On avait dansé au rythme des tambours en s'en faire saigner les pieds. Tiki avait toujours adoré ce moment où, noyé dans la foule, on se laissait simplement guider par l'instant présent. La fin de la journée avait été marqué par la descente du soleil et l'instant de médiation avait été amorcé. Ce n'était pas l'exerce le plus simple, mais il avait le mérite d'apporter un peu de calme après la frénésie des danses. Certains tenaient plus que d'autres et Tiki ne faisait assurément par partie de ceux là ! Rapidement, elle avait été troublée par son ventre gargouillant et bien qu'elle s'en sentit coupable, elle fut heureusement quand les premiers quittèrent les cercles de méditations et qu'on commença à amorcer le repas de la fin de la journée. Chaque clan avait apporté les produites de leurs chasses et de leurs cueillettes et rapidement, autour des feus, on faisait passer des écuelles grossièrement taillés dans le bois généreusement rempli. L'alcool n'était pas absent du reste. Pour sa part, presque par timidité, Tiki été majoritairement restée avec les membres des Tatati c'est tout naturellement qu'elle alla les rejoindre, assiette en main, pour ce repas à la lueur du feu. Mais... dans la petite assemblée qu'ils formaient en rond autour du feu, une silhouette se détachait tout particulièrement : Mésolie Tête-haute. Qui ne pouvait que bien porter son surnom et nom car elle dominait largement le reste de la foule d'une tête. Et pour cause : elle était une mésorianne adopteé par le clan depuis son plus jeune age. Comme tout le monde ici, elle portait des motifs de spirale, et avait dansé avec eux. Les membres du clan semblaient tout à fait d'accord avec ce fait... Mais pour Tiki la chose semblait ... Blasphématoire. On fêtait Eliwha... Qu'est-ce qu'une "née d'Hygérie" avait à faire ici ? Elle avait certes été élevée par les Tatati, mais cela n'en faisait pas une Okanakie pour autant... Visiblement, seule Tiki semblait être dérangée par ce "détail" car tout le monde la traitait en égale... Alors que les discussions allait de bon train, l'une des paroles de Mésolie porta jusqu'aux oreilles fines de Tiki. - J'ai toujours aimé cette fête, c'est mon moment préféré de l'année ! C'est tellement conviviale !Etait-ce les gorgées d'alcool qui parlèrent, mais Tiki s'entendit répondre : - Oh, je suis sûre que les tiens aussi célèbrent généreusement votre Déesse Mésolie tourna vers elle sa haute tête avec une moue interrogatrice. - Les ... miens ?- Oui. Les mésorians : tu sais des grandes échasses qui prient Hygérie. Ils doivent bien avoir une fête du même genre. La remarque jeta un froid auquel Tiki ne fit même attention. Les membres du clan la regardèrent l'air de la découvrir pour la première fois. Mésolie, elle, semblait perplexe et ajouta un peu hésitante. - Je ... Je ne sais pas. La remarque fit hausser les sourcils à Tiki d'un air presque moqueur. - Tu ne sais pas comment on célèbre TA déesse ? Assurément, l'alcool faisait fuir sa pensée profonde aussi lentement que sa conscience tentait de la rappeler à l'ordre. - NEYTIKI ! L'apostrophe la fit à peine sursauter et elle se tourna vers sa mère. - Pas besoin de crier, je suis juste à côté. - Je peux savoir qu'est ce qui te prends ? Quels sont ces propos ? Mésolie est une Tatati. Surveilles tes remarques. - Une Tatati ... Vraiment ? Je la trouve un peu grande pour ça. Et je pense qu'Eliwha serait de mon avis.Elle dépassait une limite sans même freiner une seule seconde. D'ordinaire, sa méfiance se justifiait facilement : la méfiance envers les étrangers au clan. Son rôle de protection. Mais là... elle n'avait rien pour déguiser efficacement la vraie pensée qui sous tendait ses propos. Elle le remarqua dans le regard de sa mère qui la regardait comme si elle la voyait pour la première fois. Un regard qui disait "je ne t'ai pas élevée comme ça". L'audace de la chasseuse fut rapidement agacée par cet air outré. Et peut-être aussi, blessée, de ne pas être à la hauteur des attentes de sa mère. Encore une fois... Alors que la soigneuse inspirait pour répondre, vraisemblablement par une réplique maternelle et moralisatrice, Tiki posa son assiette et se leva. - Ne te fatigue pas. Puis sans autre cérémonie elle quitta le groupe sans prendre en compte les appelles de sa mère. Se faufilant dans la foule, elle n’aspirait qu'à s'éloigner... Elle fuyait oui. Ce que les siens appelaient tolérance et qu'elle nommait parfois hypocrisie... Rapidement, elle se retrouva plus à l'écart qu'elle ne l'avait souhaité comme si elle avait aussi voulu fuir l’oppression de la foule. Elle s'arrêta, là, plantée aux milieux des arbres, la respiration rapide, les poings serrés. Une ou deux seconde passèrent... Puis brusquement : son ventre gargouilla. - Et merde. [/quote] |
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| Sujet: Re: Entre flux et grands lacs [Manaki] 18/11/2015, 23:02 | |
| Le clan se préparait à la fête des flux depuis une bonne lune. Les consignes avaient été données, simples et indiscutables : faire honneur à la Déesse. Si ce genre d’effervescence était monnaie commune chez les Okanakis à l’approche du printemps, elle prenait une toute autre dimension au sein du clan. Plus qu’une célébration, c’était un témoignage de foi que Manaki comptait bien exposer à la face du monde (ou au moins des Grands Lacs). Il avait eu l’occasion de voir les merveilles que les siens pouvaient accomplir sous la contrainte et tout particulièrement à cette période de l’année où la frénésie religieuse était si facile à enflammer. Akila le soutenait, évidemment, et ensemble ils étaient parvenus à fédérer l’intégralité du clan pour récolter et cuisiner baies, racines, venaisons et poissons destinés à voyager avec eux jusqu’au Totem. Puisque le Chef du clan ne faisait jamais les choses avec sobriété, il avait aussi exigé qu’on décore les vêtements de chacun et qu’on produise en quantité phénoménale cette mixture dont ils se décoreraient le corps entier. Le but du Tenace était simple : faire honte aux clans plus modestes.
Le clan Opotchli se mit en marche relativement tard, modulant ses déplacements pour n’atteindre les lieux que le jour de la fête des flux, déjà habillés et peints. Manaki avait souhaité leur arrivée immanquable et s’était intérieurement réjoui du succès de l’opération. Ils auraient bien l’occasion de participer au troc après les réjouissances, le plus important était de marquer les esprits dès le début. Le camp fut rapidement monté et enfin, ils purent se joindre aux Okanakis déjà présents pour commencer les célébrations. Le Tenace les avait fortement encouragés à se disperser et profiter de cette occasion pour lier de nouvelles amitiés, se mesurer aux chasseurs d’autres clans et laisser Eliwah guider leurs pas. A son goût, trop de clans restaient cloîtrés entre les murs de leur sociabilité limitée. Pendant la fête des flux, Manaki ne voulait pas de clan mais plutôt des émissaires, fiers représentants de leur mode de vie exemplaire. Qu’ils aiment, qu’ils diffusent, qu’ils se plaignent, les Opochtli gagnaient en renommée à chaque nouveau printemps.
Le Tenace avait appliqué ses propres conseils et s’était éloigné des siens pour trouver de nouveaux Okanakis avec lesquels... communier. Jeune adolescent déjà, il attendait avec impatience les danses frénétiques de la fête des flux pendant lesquelles les esprits quittaient leur conscience, bien trop échauffés par l’ambiance générale et l’alcool. Retirait-il la moindre honte en profitant de la transe passagère de jeunes femmes pendant ces instants-là ? Absolument pas. Aussi avait-il bu, dansé, partagé et fusionné avec Eliwah à travers tout un tas de flux différents. Le Tenace s’était laissé emporté par l’euphorie générale mais ne put totalement faire abstraction des quelques visages non-Okanakis qu’il avait aperçus dans la foule. Leur présence quotidienne au sein des clans était déjà un affront à leurs ancêtres mais les voir ici en ce premier jour de printemps était tout bonnement intolérable. Une profonde rage s’était répandue en lui au début de la journée, sans qu’elle ne puisse le quitter plus de quelques minutes. Il était révulsé par ces chefs qui acceptaient cette sale engeance parmi les leurs comme s’il avait suffit qu’ils adorent Eliwah pour en faire des Okanakis. Que pouvaient-ils bien savoir de la Déesse des flux avec leurs corps difformes tout juste capables de se mouvoir, sans parler de ces villes à l’odeur nauséabondes. Ces êtres étaient répugnants, vivant dans leur propre souillure et la bassesse de leur âme. Le Tenace avait vainement tenté de les mépriser de loin pour davantage se concentrer sur son peuple mais ses efforts n’avaient pas suffi. Quelques grossièretés subtilement glissées lui échappèrent tandis qu’il gardait un œil sur leurs faits et gestes, prêt à bondir pour déclencher un scandale au premier écart.
Alors que le jour commençait à disparaître derrière l’horizon, il s’était retiré de la foule pour retrouver l’orée de la forêt, bien plus calme, où il pourrait laisser son esprit voguer vers ce que bon lui semblait sans être dérangé. Un trop grand nombre de penseurs avait tendance à le perturber. Le Tenace n’avait toujours pas quitté sa transe lorsqu’Akila vint le rejoindre, les mains pleines de victuailles appétissantes et boissons enivrantes. D’un vague hochement de tête, il le remercia et les deux hommes se mirent à manger en silence en observant la foule se mouvoir progressivement. Les clans se reformaient d’eux-mêmes et accueillaient ici et là des Opochtli facilement reconnaissables. Il parcourait des yeux ces attroupements, l’air satisfait et enjoué, à la recherche d’une quelconque diversion en mesure de ranimer ses ardeurs quand une discussion un peu trop vive attira son attention. Trop loin pour entendre, il attendit néanmoins que les choses tournent mal puisqu’une mésorianne était impliquée. Avec un peu chance, elle allait lui fournir une raison de montrer ses talents d’orateur. C’est avec déception que le Tenace vit une jeune femme se détacher du groupe, l’air contrarié et le pas résolu, mettant fin au conflit tout juste naissant. Il aurait certainement effacé ce non-évènement de sa mémoire si l’Okanakie ne s’était dirigée vers eux avec ce visage colérique. Il hésitait. La pêche serait certainement meilleure autour d’un feu... Le temps qu’il se décidât, Akila était parti en quête de distraction et la jeune femme passait non loin de là. Manaki se laissa finalement avoir par la tentation et la curiosité, il parviendrait peut-être à en retirer quelque chose. Dans le pire des cas, il l’abandonnait là et partait rejoindre son chemenn. Il se redressa donc de l’arbre contre lequel il s’était appuyé et fit quelques pas silencieux dans sa direction, les yeux pétillants. La sonorité intestinale de la jeune femme arriva jusqu'à lui sans élégance, provoquant un rire moqueur qu’il adoucit d’un air... agréable ? Le visage qui se tourna vers lui n’était pas celui d’une fine fleur gracieuse et raffinée, mais plutôt d’une chasseuse au caractère bien trempé que la timidité n’entravait pas. Manaki haïssait la timidité. Il n’avait pas encore ouvert la bouche que son assiette se tendait vers l’Okanakie affamée dans un geste dépourvu de gêne. Etre face à une inconnue ne lui donnait pas davantage de convenance. Quelque chose dans son attitude ne laissait guère de choix à la chasseuse que de se saisir de la nourriture tendue, certainement la pression subtile que son caractère dominateur imposait. Le refus n’était pas une option. Tandis qu’elle le déchargeait de son offrande, le Tenace observa son interlocutrice dans le détail, la parcourant d’un regard rapide mais indiscret. Il arborait toujours ce sourire engageant quoiqu’il se tinta clairement de malice lorsqu’il lui adressa enfin la parole.
« - Ces impotents ne valent pas le coup de s’affamer... même si je perds également l’appétit en leur présence. »
Le ton de sa voix était doux, il n’avait pas besoin de parler bien fort pour qu’elle le comprenne et cela ajoutait toujours à la sensation d’intimité. Le Tenace comptait bien amener la jeune femme sur un terrain de mutuelle entente pour gagner sa confiance plus rapidement, aussi continua-t-il sur ce même ton de confidence :
« - Célébrons donc Eliwah entre Okanakis. Mon nom est Manaki. » |
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| Sujet: Re: Entre flux et grands lacs [Manaki] 22/11/2015, 10:32 | |
| Entre flux et grands lacs - FÊTE DES FLUX - 1er jour de printemps 1649 - Grands lacs - Îleglace Un rire la fit se retourner. Si son visage lui était inconnu, la richesse des peintures qui s'étendaient jusque sur ses vêtements lui permis de visualiser le clan auquel il appartenait : Les Opochtli. En toute honnêteté elle ne connaissait rien de ce clan, mais comme beaucoup elle n'avait pu ignorer leur arrivée des plus remarquables. Comme elle avait surpris une moue mitigée sur le visage d'une de ses amies Tatati elle lui avait demandé qui ils étaient. La réponse avait courte et directe : "Les Opochtli, ne t'approchent pas trop d'eux". N'ayant pas cherché plus loin, elle avait évité de les croiser... Du moins jusqu'à ce moment précis ou l'un des membre lui tendait sa gamelle. Le geste la laissa perplexe et elle fit aller son regard de la gamelle au visage balafrée de l'homme comme pour y deviner une intention masqué. Mais inlassablement quand son regard accrochait le cyan glacé qui coloraient les prunelles de son interlocuteur, elle perdait la fouge de la protestation. Comme si quelque chose lui disait "tu n'es pas de taille". Alors, elle s'empara de l'assiette, ne cherchant pas à savoir si elle fait là une erreur ou non. Elle avait quitté son groupe pour fuir les tensions ce n'était pas pour en faire naître ailleurs. Ainsi rangea-t-elle dans un coin de sa tête le conseil de son amie sans le laisser prendre trop de place. Elle était bien assez grande pour décider seule à qui elle voulait parler... Certes, le visage de l'homme n'était pas des plus engageants surtout en vu de la mutilation qui lui barrait le bas du visage. Mais Tiki n'avait jamais fait bien attention à son physique, alors elle ne s'attardait pas plus sur celui des autres. Elle supposait qu'il s'agissait d'un accident de chasse. Les cicatrices n'étaient pas rares quand on occupait le rang des chasseurs... L'homme ne tarda pas à lui faire découvrir le son de sa voix et ses paroles firent frémir Tiki d'une honte inavoué. Elle coula un regard coupable vers le groupe qu'elle venait de fuir en repensant à ce qu'il venait de dire. Savoir que des gens avaient compris, et suivit la "dispute" ne faisait qu'accroître sa culpabilité. Ainsi se sentit-elle obligé de se justifier. - Ce n'est pas qu'ils me coupent l'appétit... C'est juste que... Sa phrase se suspendit car la première chose qui lui avait traversé n'était pas diplomatique très correcte. Elle cherchait vivement une phase capable d'exprimer sa pensée mais qui diluait à la fois la colère qui la sous-tendait... Mais elle n'en trouva pas. Ainsi se mâchonna-t-elle la lèvre indécise et surprise elle-même ne pas trouver une phrase de tolérance comme on lui en servait pourtant à toutes les sauces et dans laquelle elle puise se retrouver. Elle plongea le regard sur l'assiette comme si son contenant était particulièrement intéressant jusqu'à ce que l'homme reprenne la parole pour se présenter. Elle releva les yeux et lui répondit : - Neytiki La furtive. Levant l'assiette elle ajouta : - Merci. Il lui semblait que c'était à ce moment là qu'elle devait dire quelque chose d’intéressant, et de bien plus engageant que tout ce qu'elle avait prononcé jusque là. Et comme parler de météo sous un ciel nocturne n'était pas très évident elle s'entendit la première chose à laquelle elle avait pensé : - On m'a conseillé d'éviter d'approcher ton clan. C'était l'un de ces moments ou sa franchise prenait trop le pas sur le reste et ou elle regrettait ses paroles une seconde après les avoir seulement prononcé. C'était comme ça, quand quelque chose la chiffonnait, elle devait comprendre pourquoi. Et là sa question était : pourquoi ne pas approcher quelqu'un qui offre pourtant sa hésitation son assiette à son prochain ? - Mais j'vois pas pourquoi. Ajouta-t-elle comme pour adoucir la franchise de sa première réplique. Et comme pour appuyer ses dires, elle piocha dans l'assiette sans méfiance, regardant Manaki comme pour attendre de lui une explication ou une solution à son dilemme. [/quote] |
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| Sujet: Re: Entre flux et grands lacs [Manaki] 26/11/2015, 20:06 | |
| Manaki avait patiemment observé la jeune femme se débattre avec ce qui semblait être des dilemmes intérieurs, ou peut-être une certaine méfiance qui ne l’aurait guère surpris. L’honnêteté n’était pas toujours évidente à assumer, en particulier au sein de clans aussi laxistes que les Tatati. Elle avait certainement besoin de quelques encouragements pour embrasser sa haine, la pauvre enfant. Indéniablement, elle en cachait une belle quantité sous son air gêné. Elle avait déjà implicitement accepté son invitation en se saisissant de l’assiette tendue et Manaki en eut la confirmation lorsqu’elle lui retourna la politesse de se présenter. Le surnom dont elle était affligée lui fit froncer très légèrement les sourcils, surpris de voir qu’un tel qualificatif était attaché à cette femme. Il n’imaginait pas la furtivité prendre corps de cette manière mais enfin... Eliwah réservait des surprises à chacun. A moins qu’il ne s’agisse d’un sarcasme très peu flatteur pour sa porteuse. Il ne fallait jamais sous-estimer la cruauté des gens. Le Tenace en était là de ses réflexions, oubliant presque le reste du décor, lorsqu’elle orienta la discussion vers des questionnements auxquels il ne s’attendait pas. Le moins qu’on puisse dire était qu’elle faisait preuve de beaucoup de délicatesse pour amener la chose... Alors comme ça il valait mieux éviter la compagnie des Opochtli ? Le compliment lui alla droit au cœur, même s’il savait pertinemment qu’une bonne partie des siens ne méritait pas cette réputation. Mais qu’importait, ils avaient pris suffisamment de puissance pour qu’on jugeât utile de parler d’eux et peut-être même qu’on les craignit. Manaki aimait à penser que leur arrivée sur les lieux avait suscité nombre de regards et de commentaires (qu’ils soient élogieux était un détail) et la réaction de Neytiri le confortait dans cette idée. Elle avait de toute évidence pu l’identifier comme faisant partie de ce clan grâce à ses peintures et habits, mais soupçonnait-elle seulement être en train de parler à leur chef ? Le Tenace en doutait. Sa remarque lui éclaira le visage d’un plaisir assumé tandis qu’il formulait un « ah, vraiment ? » plus provocateur que surpris. Le sérieux de la jeune femme tranchait radicalement avec son attitude rieuse alors qu’elle terminait de parler. De toute évidence, les raisons pour lesquelles on lui avait conseillé de se tenir à distance ne lui avaient pas sauté aux yeux, comme le montrait son regain d’appétit. Il y avait fort à parier que la mise en garde venait des Tatati et à juste titre puisque la relation entre les deux clans n’était pas des plus pacifiques. Il suffisait de voir avec quoi ces merdeux vivaient pour comprendre d’où venait le problème. Ils avaient du reste bien raison de les redouter car un assainissement de leurs rangs viendrait tôt ou tard. En attendant, ils faisaient ce que Manaki espérait d’eux, contribuant efficacement à sa satisfaction. C’est donc le sourire aux lèvres qu’il la regardait manger, dans l’attente de croiser son regard pour pouvoir lui répondre.
« - Pourquoi ? Mais il me semble que la réponse est facile à trouver... n’est-ce pas évident que je prévois de te violer et t’égorger derrière l’un de ces arbres ? La nourriture est l’un des meilleurs moyens pour attirer une proie. »
Son sourire avait progressivement laissé place à un sérieux dont l’intensité était aussi surprenante que malvenue dans cette conversation. La cruauté de ses traits ressortait de manière évidente maintenant qu’il cessait de parader avec cet air avenant, lui laissant tout le loisir d’observer ce qui peut-être justifiait le conseil donné. Lentement, le Tenace s’approcha de la jeune femme en planta son regard froid dans le sien, jusqu’à être enfin à sa hauteur. Il se saisit d’un morceau de viande posé sur l'assiette et le porta à sa bouche, le mâchant à peine avant d’avaler. Manaki haussa nonchalamment les épaules et reprit son discours avec plus de légèreté.
« - Nous vivons selon des principes qui ne plaisent pas à tout le monde. La différence dérange... et ce n’est pas moi qui les blâmerais. »
Il appuya ses derniers mots d’un regard entendu avant de reculer pour se saisir de la gourde en peau animale posée sur le sol, un sérieux besoin d’alcool se faisant sentir. |
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| Sujet: Re: Entre flux et grands lacs [Manaki] 27/11/2015, 12:18 | |
| Entre flux et grands lacs - FÊTE DES FLUX - 1er jour de printemps 1649 - Grands lacs - Îleglace Les grands Lacs, en hivers, prenaient leur temps pour geler, mais une fois le processus enclenché on pouvait observer la glace qui lentement figée leur surface dans un dessin lisse et froid. L'expression que venait de prendre Manaki faisait penser à cela. Lentement, ses lèvres avaient atténués leur courbure pour figé son expression dans un dessin qui n'avait rien de chaleureux. La profondeur glaciale de son regard ne faisait rien pour améliorer les choses, et ses paroles, prononcées avec tant de sérieux n'ajoutaient aucune dimension comique au tableau. Tiki sentit sa nuque se raidir, bientôt suivi par le reste de son corps alors qu'il se rapprochait d'elle. Sur ses gardes, elle n'en restait pas moins perplexe. Était-il sérieux ? Ou faisait-il partie de ses gens dont le sens de l'humour était à classer dans la rubrique "Douteuse" ? Impossible, devant l'expression qu'il affichait de deviner le vrai du faux et elle sentait la tension monter jusqu'à ce qu'il la fasse lui même redescendre en s'en prenant plutôt au contenu de l'assiette qu'à elle. Alors qu'il avala l'un des morceaux de viande Tiki se sentit soulagée : C'était au moins la preuve qu'il n'avait rien mis dedans... Alors que l'homme semblait avoir repris une attitude tout à fait normale, Tiki s'interrogeait sur ce qu'elle venait de vivre. Elle n'était pas sûre d'avoir compris... Elle était certaine de ne pas avoir aimé. Mais elle réalisa qu'elle l'avait peut-être mérité. Re-pensant à ses paroles, elle songea qu'elles n'avaient pas été particulièrement douces... Peut-être que comme la majorité des gens, il y avait des sujets sur lesquelles il ne fallait pas chatouiller Manaki... - Désolée. S'entendit-elle annoncé en réponse à ces paroles. - Je voulais pas paraître blessante. Sur ce que j'ai dit sur ton clan. Son regard se fit un peu fuyant. - Des fois je parles trop vite... Souvent même... Mais tu sais, je ne suis pas toujours d'accord non plus avec les Tatati. Je n'appartiens pas à leur clan de toute façon. J'ai simplement accompagné ma mère qui est venue leur rendre service. On a décidé de rester pour faire la fête des flux ici mais on est pas vraiment habitué au coin... On est plutôt du côté des jumelles. Ses paroles sonnaient un peu la justification, elle même le percevait, mais elle se sentait coupable d'avoir si mal abordé l'homme qui, pourtant, n'avait rien jugé d'elle et avait partagé son plat avec elle. Peut-être était-il temps pour elle de passer plus de temps avec les humains au lieu d'en passer à tuer des bêtes. Ses approches sociales sentaient la poussière et grinçait comme une vieille porte oubliée. Quelque chose en elle voulait se débarrassé de l'image "Tatati" aux yeux de l'Opochtli pour engager la rencontre sur des meilleurs bases... Car après tout, Tiki était prête à parier que si les Tatati n'aimaient pas les Opochtli c'était sûrement du à leur comportement protecteur envers Mésolie... - Je présume que ce n'est pas votre cas. Tu as l'air plutôt habitué à tout ce froid. |
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