Il est l'aîné de deux frères et une soeur. Le premier, Lestat, 27 ans, ne le porte pas dans son coeur, et lui-même ne l'aime pas. Le second, Lochlan, 26 ans, est admiratif. Sa soeur, Iliahys, 25 ans, aime ses trois frères autant les uns que les autres, et il se montre toujours très protecteur envers elle, malgré sa froideur légendaire.
Père décédé, doyen Sorel Delenol. Mère, Isorah Delenol, bienveillante envers ses enfants, et méfiante à l'égard de son aîné, mais aimante.
ll possède actuellement deux esclaves Torkos, un homme et une femme. La femme est aux petits soins avec lui, lui fait à manger, s'occupe de lui brosser les cheveux, du rangement. L'homme quant à lui, est prédestiné à lui servir de défouloir, subissant parfois ses "pulsions", mais officiellement, il porte surtout ses affaires et lui sert de scribe. Même s'il peut se montrer très dur envers eux, au fond, il les apprécie et reste très protecteur. Que quelqu'un lève la main sur un de ses esclaves, et il se retrouvera avec l'épée sous la gorge.
Il entretient une relation de couche avec une certaine Calliopée.


 

La pénombre gagnait le manoir ce soir-là, tandis que le soleil s'effaçait à l'horizon. Tapi dans l'ombre naissante, une servante s'affairait à habiller un homme, debout, de dos, immobile, les paupières closes. Pas un mot ne s'émanait de la pièce, même les gestes de la torkos se faisaient sans bruit. Il régnait un silence absolu, à rendre sourd n'importe qui. Elle l'habillait, l'ornait d'étoffes de soie plus resplendissantes les unes que les autres. Elle brossa alors sa chevelure d'ébène, reformant finement ses boucles délicates. Un peu de crème sur ce visage impassible, pour affiner son teint. Deux traits de poussières d'or sous les yeux. Il était fin prêt. La servante se plaça face à lui, l'homme ouvrit les yeux et la regarda. Elle frémit, ne l'ayant jamais trouvé plus beau qu'à cet instant. Elle lui tendit alors une boîte dans laquelle se dressait fièrement une chevalière imprimée de l'insigne de sa maison en diamant. Il la passa à son doigt. Et, sans troubler le silence imposant de la pièce, il se mit en marche, sortit de sa chambre, pour rejoindre d'un pas impérieux la grande salle. Il se tint au seuil, attendant qu'on sonne le glas de sa sentence, impatient et pourtant angoissé. Tous les yeux des personnes présentes se posèrent alors sur sa silhouette se détachant de l'antre. Lumières.

On pourrait croire que ce qui va suivre est une suite logique des choses. Mais à dire vrai, Samaël n'aurait jamais pensé, enfant, que ce jour arriverait. Tout commença à l'âge de ses sept ans, lorsqu'on gagea qu'étant l'aîné, il devait être préparé dès son plus jeune âge. Dès lors, on l'affubla de tout type de professeurs particuliers. Histoire, escrime, géographie, anthropologie, économie, philosophie, mathématiques, langues. Tout un tas de matières trop lourdes pour un simple marmot. Mais voilà, le hasard avait décidé que ce ne serait pas un enfant banal comme les autres. Parce qu'il était l'aîné, il se devait d'exceller et de montrer l'exemple à ses frères et soeurs. Qu'une bêtise surgisse, et ça lui retombait dessus. Un de ses frères et soeurs avaient le malheur de fauter, et c'était lui qu'on punissait...

Père... Ce n'est pas moi qui ai volé chez le marchand.

Je le sais. Mais toi, à treize ans, tu dois savoir aussi ce qu'est d'avoir des responsabilités.

Sans plus de mots, Sorel, père et doyen, avait cogné son fils pour la première fois. Jamais encore il n'avait levé la main sur lui d'une telle façon. Il était en colère. Et chaque fois suivante où l'un des quatre avait fauté, c'était encore lui à qui l'on donnait une correction.
Plus le temps passait, plus Samaël commençait à gagner en autorité. Que ses frères ou sa soeur prévoient de faire une bêtise, et il les rappelait à l'ordre immédiatement d'un ton sec, presque menaçant. Mais à l'instar, si d'autres enfants s'amusaient à les emmerder, il rentrait dans une colère noire et les provoquait en duel. Il gagnait à chaque fois, toutes ses leçons en tout genre donnant le fruit de son labeur. Il avalait des tonnes de connaissances, et put bientôt participer aux dîners de la haute société.
C'est à l'âge de vingt ans qu'il entra dans le grand monde. Il échangeait avec toute sorte de gens, adultes, vieillards, et tous appréciaient la justesse de ses propos, l'ardeur précoce de ce jeune homme. Tous savaient déjà qu'il était l'héritier, seul lui l'ignorait. Pourtant, la ferveur de son paternel ne s'apaisait pas pour autant. Sorel lui en demandait toujours plus. Il n'avait plus le droit à l'erreur. Et il avait beau faire les choses bien, jamais il n'avait décelé la moindre trace d'amour de cet être au coeur de pierre. Il ne s'était jamais senti aimé par ce père qui lui demandait la lune. Quant à sa mère, elle n'en montrait pas vraiment plus. Elle se concentrait davantage sur ses autres enfants, car elle ne devait pas interférer avec l'éducation de son aîné. L'amour ne forge pas le caractère, l'expérience et la douleur, si.

Alors, pour compenser ce mal être qui le rongeait intérieurement, Samaël commença à fréquenter des gens en secret, à les séduire, à les inviter, puis à finir dans son lit avec eux.
Jusqu'au jour où Sorel comprit le manège que jouait son fils. Et qu'il comprit surtout qu'il avait commencé à éprouver certains sentiments à l'égard d'une jeune femme. A vingt-deux ans, c'est normal, non, de découvrir l'attirance émotionnelle ? Non, ça ne l'était pas. Pas pour un Delenol, pas pour un héritier.
Alors, en guise de punition, Sam fut de nouveau battu, et la famille de la jeune femme fut contrainte de la marier sans quoi ils seraient tous accusés de corruption envers la famille doyenne. Et le nouvel époux emmena sa douce sur d'autres terres d'Archipel, loin d'ici, loin de lui. Loin de lui qui ne pouvait qu'obéir et le regarder partir, visiblement heureuse d'avoir trouvé un mari. Trahi, trompé, et poussé à bout de rage, c'était ainsi qu'il se sentait. Il fallait qu'il l'oublie, il fallait que lui aussi finisse dans les draps d'une autre pour se venger, car il ne pouvait rien faire de mieux pour le moment.
Alors il s'était rendu en ville, dans une maison de passe qui lui avait indiqué un bordel réputé. Il paya allègrement son informateur, et l'assigna de lui faire envoyer une demoiselle à l'auberge indiquée. Il ne dégaina pas un seul sourire à son arrivée, ne la salua pas, ni ne lui demanda son prénom. Il s'en foutait.

Je ne veux pas un seul mot si ce n'est les cris qui pourront émaner de cette nuit. Rien de plus, juste le silence. Je veux juste oublier.

Sans attendre son reste, il avait plongé son regard autoritaire dans ses yeux, avait effleuré son épaule, et l'avait totalement dévêtu. Cette nuit-là, il avait utilisé toute sa haine comme force pour se satisfaire. Et les fois suivantes, parce qu'il avait décidé qu'il y aurait de nouvelles fois, il avait toujours employé la même ardeur. Il ne s'était jamais montré violent, simplement bestial, semblant rechercher l'oubli par la fougue. Et c'était arrivé, il avait fini par l'oublier.

Il avait fini par apprendre le prénom de sa demoiselle de plaisance, et certifiant fermement à son père qu'il n'y avait rien d'autre que des parties de jambes en l'air entre eux, ce dernier avait accepté. C'était la première fois qu'il obtenait un retour satisfaisant. Désormais, il pourrait continuer de voir la belle Calliopée à l'abri des regards, jamais au manoir, jamais au bordel, toujours dans des lieux différents. Et il la payait dignement.

Les années passèrent, les conquêtes aussi, aussi bien nuptiales que rivales. Samaël était devenu un homme, et se dressait maintenant comme l'héritier officiel du doyen Delenol. C'est lui prendrait sa place le jour venu. On lui avait même offert deux esclaves torkos en guise de reconnaissance. Lorsqu'il serait marié à une fille de famille doyenne, et que son père se ferait trop vieux, c'est lui qui deviendrait doyen. Seulement...

Il avait déjà souhaité la mort de son père, sans se résigner à la lui donner lui-même. Et il ne pensait pas que ce jour arriverait aussi vite. A l'aube de ses vingt-neuf années, le doyen Sorel rendit l'âme lors d'une partie de chasse. Ils avaient été envahis par des rebelles qui avaient réussi à lui porter un coup fatal au coeur. Pendant que se préparaient les funérailles, et alors que toute la haute société était attristée par cette perte, Samaël lui, complètement insensible face à la mort, ne put se concentrer sur autre chose que sur la vengeance. Il s'était mis en chasse à son tour, et avait traqué le traître qui avait indiqué la position du campement son père et ses hommes. Et alors que tous versaient leurs larmes devant le cadavre qu'on scellait à jamais sous la terre, le brun s'avança avec la tête du traître en plein milieu de la foule, la brandit à bout de bras afin que tout le monde la voit :

Voilà ce qu'on fait aux traîtres chez nous ! Pour Sorel !

Et tous l'avaient applaudi. Les funérailles s'étaient poursuivies, et dix jours étaient passés...

La silhouette imposante du fils aîné traversa la foule sous les regards impressionnés et impatients. Il n'y avait plus de représentant à Îleval, depuis que Sorel était mort. D'ordinaire, c'est sa mère qui aurait dû prendre ce rôle à sa charge. Mais...

" Citoyens d'Îleval, par la présente lettre laissée par notre doyen précédent, j'ai l'honneur de vous présenter celui qui nous représentera dès à présent, à la demande de Sorel lui-même."

L'homme important ayant prononcé ses mots invita l'aîné à monter sur l'estrade.

" Samaël Delenol, fils aîné et héritier de Sorel Delenol, par dernier ordre mandaté de votre défunt père, vous êtes désormais le nouveau doyen d'Îleval. Petites gens, acclamez-le !"

Et dans une hystérie d'applaudissements, l'homme porta le seau de la maison doyenne au torse du nouveau doyen, officialisant dès lors son tout nouveau statut. Celui de dirigeant d'Îleval.

*C'était donc ça, Père... Vous ne m'avez jamais porté un seul regard affectueux, vous vous êtes toujours montré dur et dédaigneux envers moi. Vous avez détruit tous mes espoirs, tous mes moments de joie. Tout ça dans le but de faire de moi le nouveau doyen ? Je comprends mieux à présent. Je vous pardonne.*