Heka Roseau Dansant : Mère biologique. On lui a donné ce surnom en rapport avec le roseau qui plie mais jamais ne casse face au vent. Elle a disparu il y a maintenant cinq ans. Elle s'entendait très bien avec sa fille.
Adonis Echo de Tonnerre : Père biologique. Il tient ce surnom de ses excès d'autorité, capable d'hausser la voix aussi fort que le tonnerre qui gronde lorsqu'il se met en colère. Il a disparu en même temps qu'Heka. Même s'il était dur, il semblait porter un grand intérêt à sa fille, et ne s'est que très rarement énervé contre elle.

Dhankin Le Loupiot : Depuis la disparition de ses parents, Dhankin l'a en quelque sorte recueillie sous les ailes de ses griffos. Lorsqu'elle se sent seule, c'est vers lui qu'elle se tourne. Lorsqu'elle est triste, c'est dans ses bras qu'elle va pleurer. Lorsqu'elle s'ennuie, il lui propose souvent de l'aider à s'occuper des griffos, en leur donnant à manger ou en nettoyant leurs plumes, par exemple. Juka le considère comme un grand-frère de substitution, et sait qu'elle peut compter sur lui quoiqu'il arrive. Elle aime lui parler de tout et de rien, lui raconter ce qu'elle a fait de sa journée. Elle apprécie aussi le fait qu'il la protège et l'encourage, et est contente qu'il essaye de lui apprendre quelques facettes de son métier.

Arasen Vif-Archer : Elle ne le connaît pas depuis longtemps, mais sait d'avance qu'elle prendra un malin plaisir à l'emmerder. Si l'homme peut paraître froid de premier abord, elle n'a quand même pas hésité à le mener au clan lorsqu'ils se sont rencontrés. Depuis, chaque jour, elle se rend à sa yourte pour apparaître furtivement, lui poser des questions, demander s'il n'a pas besoin d'aide, ou encore pour essayer de le sociabiliser un peu, ou jouer avec Nym, le petit ligor qui l'accompagne. S'il peut parfois sembler en avoir marre de se la coltiner, au fond, elle sait qu'il la tolère, car lui aussi lui propose parfois de l'aider, comme en allant ramasser du bois pour la confection d'un arc. Et de toute façon, elle, elle l'aime beaucoup, donc peu importe le nombre de fois où il essaiera de la chasser, la rouquine reviendra toujours vers lui.

 

C'est une enfance banale, celle d'une gamine qui a grandi dans la joie et la bonne humeur. Entourée de ses parents au sein du clan Ereshai, la vie suivait son cours tranquillement, lui apportant chaque jour son lot de bonheur. Depuis toute petite, Juka a toujours été maternée, sa mère lui portant beaucoup d'attention, et son père prenant soin de tenir sa langue en sa présence. Echo de Tonnerre n'avait pourtant pas la réputation d'être doux. Mais avec sa fille, c'était différent. C'était leur petit trésor, et ils privilégiaient chaque moment passé à ses côtés. Les années passèrent au sein du clan, sans que rien ne vienne troubler sa petite vie de gosse tranquille.
Pourtant, alors qu'elle avait douze ans, un évènement la marqua profondément, et changea son quotidien à jamais.

Un matin à l'aube, Heka et Adonis, après avoir préparé leurs paquetages, étaient sortis de leur yourte, se dirigeant vers la forêt en saluant les leurs.
Surprise à son réveil, Juka sauta du lit, inquiète, et s'en alla demander aux premiers venus où étaient partis ses parents.

"Ils se font un petit périple d'une semaine, tu ne te souviens pas ? Ils te l'ont dit pourtant ! T'es tête en l'air, Juka, tu fais pas assez attention."

La môme avait acquiescé. C'est vrai, ils le lui avaient dit, mais habituée à voir ses parents tous les jours, ça lui était complètement sorti de la tête. Durant cette semaine, elle guetta chaque jour leur retour, le sourire aux lèvres, impatiente de leur sauter dans les bras. Les sept jours passés, ils ne revinrent pas.

*C'est rien, ils ont dû prolonger leur séjour parce qu'ils s'amusaient bien.* songeait-elle.

Une semaine passa encore, puis une autre, durant lesquelles elle passait chaque journée dans la forêt, à attendre assise sur une branche, les bras croisés, boudeuse, triste de ne pas les voir revenir.

Au bout d'un mois passé, ne les voyant toujours pas revenir, elle interrogea chaque membre de son clan un par un, obtenant à chaque fois le même genre de réponses.

"Ils sont où papa et maman, dis ? Tu crois qu'ils se sont perdus ?"

"Je ne sais pas", "Demande à Asheema", "Hein, ils sont partis ?", "Ne t'inquiète pas, ils vont revenir bientôt"

Alors pourquoi ils ne le faisaient pas ? Et pourquoi on lui lançait ces regards désolés, comme si on la prenait en pitié ? Elle ne comprenait pas.

Un an passa, pendant lequel elle continua de traîner en forêt, espérant vainement de voir leur silhouette se dessiner au détour d'un bosquet...

"Tu sais, Juka, il faudrait peut-être que tu te prépares à ce qu'ils ne reviennent jamais."

"Jamais ? Pourquoi ? Ils ont dit qu'ils reviendraient ! Ils partaient seulement en voyage. Papa et Maman m'aiment, ils peuvent pas m'abandonner ! Je suis leur petite fille !"

Et c'est en larmes que la gamine avait couru loin, loin, jusqu'à ce que ses jambes fatiguent de devoir fouler le sol. Elle pleura ainsi pendant de longues et interminables minutes, criant et implorant Eliwha de lui rendre ses parents.

Et puis, il fallut bien rentrer et se résigner. On évitait dès lors de faire allusion à Roseau Dansant et Echo de Tonnerre. C'est là qu'elle comprit réellement ce que le clan pouvait lui apporter. Bien plus que les siens, ils étaient à présent sa seule véritable famille. Aussi, elle entreprit de se rendre utile en allant cueillir des fruits, puisqu'elle ne savait pas faire grand chose. Au moins pouvait-elle grimper facilement aux arbres. Ils découvrirent aussi peu à peu avec quelle aisance elle s'approchait silencieusement, prenant un malin plaisir à surprendre et à embêter qui elle pouvait. De l'attention, c'est tout ce qu'elle réclamait. Gosse délaissée, elle cherchait l'affection et le moindre contact. Et si pour ça il fallait faire des bêtises, alors elle les faisait. Un sourire signifiait énormément pour elle. Quant aux réprimandes, elle les appréciait aussi, elles sont une sorte de proximité, après tout. C'est ainsi qu'on lui donna le surnom de Patte de Zéphyr, aussi bien pour la douceur et le silence de pas qu'il suppose, mais également pour le contact agréable qu'elle peut dégager.

Elle trouva son réconfort auprès de Dhankin, le dresseur de griffos, qui la prit sous son aile sûrement par compassion, ou parce qu'elle lui rappelait ce que lui aussi avait vécu, en un sens. Avenant, il se montra toujours présent, la sortant de ses virées quotidiennes. Juka a toujours aimé les animaux, et encore plus les griffos qu'elle trouve si beaux, alors, passer du temps avec eux et leur dresseur, la faisait penser à autre chose, et lui mettait du baume au coeur. Aujourd'hui, elle voit en lui comme un grand-frère par procuration, elle l'adore, et c'est vers lui qu'elle va lorsqu'elle se sent triste ou qu'elle s'ennuie.

De nos jours, la rouquine n'a jamais cessé de continuer à espérer que ses parents reviennent. Omettant cette perte, elle est devenue bornée et bavarde, ouverte à toute chose vivante dans les contrées. Elle recherche sans cesse ce contact qui la fait se sentir un peu plus importante, qui la conforte. Elle parle de tout et de rien, à n'importe qui et n'importe quoi. Elle ne voit le mal nulle part, elle le renie plus que tout. Parce qu'accepter les mauvaises choses, ce serait accepter que ses parents ne reviendront jamais. Et ça, elle ne le supporterait pas, elle refuse d'abandonner. Alors avec les gens, c'est pareil, elle refuse de croire qu'ils sont mauvais, et cherche par tous les moyens à trouver ce petit truc qui fait la différence. Elle ne voit certainement pas le monde comme les autres, emmitouflée dans ses nuages qui sourient et ses cailloux qui parlent, mais elle est heureuse ainsi, elle se sent moins seule.

Récemment, c'est un nouvel individu dont elle a fait la rencontre et qu'elle a ramené au clan qui occupe ses pensées. Bien décidée à ne pas le lâcher, elle tâche d'aller le voir tous les jours, aussi bien pour l'emmerder que pour lui demander comment il va.

Mais elle n'en oublie pas pour autant son cauchemar qui dure depuis cinq ans. Tous les jours, dès qu'elle part en cueillette, avec son grand panier, elle guette et espère encore, qu'ils réapparaîtront par magie, et qu'elle pourra pleurer de joie dans leurs bras.