Kräll Thorrog : Kräll a vécu une enfance de Torkos esclave ordinaire et est devenu au fil du temps le meilleur ami de Thorolf. Il est né à Belhovre dans une famille possédant une esclave enceinte, sa mère. Depuis, il n’a jamais quitté ses maîtres jusqu’à ce que Thorolf ne l’en libère bien plus tard. Puissant Guerrier féroce en devenir, son maître lui a laissé l’opportunité de devenir son Escorte afin de participer chaque année au Festival d’Epieux. Il est l’ainé de Thorolf de cinq années et l’a souvent battu les premières années lors de leur participation commune. Plus tard, ils se retrouvèrent en finale et s’il toucha Thorolf au premier sang, ils décidèrent par rivalité de se battre jusqu’au bout pour déterminer qui serait le meilleur d’entre eux. Il s’inclina finalement face à Thorolf et ce dernier demanda à ce qu’il soit déclaré vainqueur pour l’avoir touché au premier sang. Kräll a été très affecté par cet affront de Thorolf car il ne se considère pas comme le vainqueur de leur rencontre mais garde ce reproche au plus profond de lui pour un jour à venir pendant lequel ils se battront peut-être à nouveau pour remettre ce titre en place et peut-être même alors la place de Chef de Guerre. Il a rencontré Kaliga dans les Plaines de Givre et lui a sauvé la vie face à une créature des environs. Depuis lors, il est devenu le compagnon de Kaliga.

Roselda Azdora : Presque deux fois plus jeune que Thorolf, il l’a rencontrée dans la Chaine des Epieux lorsqu’il recherchait du monde pour intégrer les Terres de Sang. Roselda prétend être née sur l’île de Mort-Dragon et voue une véritable fascination pour ces créatures volantes. Elle rêverait d’en posséder un et a conscience qu’elle aurait plus à y gagner d’en chasser un pour l’abattre. Elle est instable et tient difficilement en place. Elle reconnaît uniquement l’autorité de Thorolf avec lequel elle a couché lors de la nuit de leur première rencontre. Elle n’est cependant pas amoureuse de lui et la considère plus comme un grand frère qu’elle préserve jalousement des autres femmes. Elle provoque souvent Kräll sur son statut de Second et prend un malin plaisir à lui rappeler que Thorolf l’a surpassé dans leur passé en commun. Concernant Kaliga, elle la déteste profondément et accepte à peine de cohabiter avec elle car elle est jalouse de ses capacités très sociales et à être acceptée bien plus facilement qu’elle.

Kaliga Tekmiss : Kaliga est née sur l’Île d’Ileglace et est la fille d’une Domestique qui servait une famille proche du Doyen. Esclave modèle, on lui a appris à aimer la Déesse de la Santé et à aider ses prochains en servant de façon impeccable dans la légalité et selon les trois commandements le peuple Mésorian. Elle n’a jamais posé de soucis à ses maîtres et a obtenu le droit de devenir une Escorte dans la seule volonté de les défendre jusqu’à la mort. Elle a donc vécu une enfance très diamétralement opposée à celle de Thorolf et leur point de vue diverge souvent sur la façon de faire les choses. Elle est devenue Affranchie lorsque sa Maîtresse âgée est morte de cause naturelle et a alors rejoint la Cité Libre de Givregöor sans but précis. Elle a rencontré Kräll lors d’une aventure solitaire dans les Plaines de Givre et il lui a sauvé la vie face à un monstre de la région. Pour régler sa dette, elle a accepté de rejoindre les Terres de Sang car même si elle pense que la façon de faire de Thorolf est trop brutale dans la plupart des cas, elle se retrouve dans ses rêves et son avenir. Elle est la compagne de Kräll.

Thorolf naquit en l’an 1605 dans la Cité Libre d’Opalgöor. Fils unique d’un couple Torkos dont l’Histoire taira leur identité cinq ans plus tard, Grinar est le nom de famille qu’il choisira plusieurs décennies plus tard. De même, il est le descendant d’une longue lignée de Berserkers mais cela n’a pour le moment aucune influence sur son avenir tout au cours de son histoire déjà vécue. Thorolf ne se souvient pas de grand-chose au sujet des premières années de sa vie si ce n’est cette sinistre et sanglante nuit où les fidèles du Dieu Zhäa se mirent en marche sur Archipel. Les parents de Thorolf se sacrifièrent afin de permettre à leur fils d’être évacué avec d’autres enfants vers Opale, le Domaine du Mâss et par conséquent probablement l’endroit le mieux protégé pour un rejeton. Avant de rendre leur dernier soupire, ils savaient qu’en sauvant la vie de leur fils aimé, ils le condamnèrent probablement à une vie de servitude auprès des Mésorians.

En effet, Thorolf était peut-être un jeune garçon de cinq ans toujours vivant alors que la catastrophe était passée mais il se retrouvait perdu au cœur de la plus belle Cité d’Archipel. Il se souvient seulement avoir erré dans les rues, tiraillé par le faim et assoiffé à la recherche de quelqu’un qui pourrait l’aider. Une nuit, il fit la curieuse rencontre d’un Mésorian adulte au croisement de deux ruelles sombres dans les bas quartiers d’Opale qui lui tendit une miche de pain et un bol de lait. Reconnaissant et persuadé d’avoir trouvé son salut, Thorolf suivit son salvateur dans la pénombre de la nuit. Le lendemain matin, il se réveilla dans un lit peu douillet et remarqua la présence d’autres enfants. Il reconnaissait certains d’entre eux car ils avaient échappé à leur destin funeste à Opalgöor quelques jours avant. Les fenêtres de la chambre commune étaient calfeutrées avec plusieurs planches de bois et il était impossible pour eux d’avoir une vue sur l’extérieur. Thorolf et ses jeunes compagnons infortunés se situaient au troisième étage d’une bâtisse qui hébergeait au rez-de-chaussée une joaillerie modeste. Le propriétaire, Tristan Morlois, tenait ce commerce depuis trois ans et avait cédé à la tentation de détenir de jeunes esclaves Torkos dans l’illégalité. Sur l’aspect juridique, le premier et second étage étaient le lieu de vie de Tristan et de son épouse, Lilianna. Quant au troisième, il avait été reconnu comme insalubre et on ne soupçonnait donc pas la présence d’enfants Torkos. Lilianna apporta à Thorolf et aux autres enfants les connaissances qui feraient d’eux de bons esclaves. Ils apprirent à lire, à écrire et surtout, à obéir. Les écarts étaient punis et il se souvenait d’avoir été privé de nombreux repas et reçu plusieurs coups de fouets. Tristan venait les voir seulement le soir afin de vérifier qu’aucun d’entre eux n’était malade. Son objectif était de pouvoir les revendre à un bon prix lorsqu’ils atteindraient l’âge légal et même si sa machinerie était illégale, il n’en était pas moins rattaché aux principes moraux de sa Déesse. Les enfants ne manquèrent donc pas véritablement d’hygiène.

De temps en temps, les plus âgés et ceux qui comprenaient et acceptaient qu’ils seraient plus tard des esclaves obtenaient le droit d’accompagner Lilliana et / ou Tristan en ville pour faire quelques courses. Les divertissements étaient prohibés car ce n’était aucunement pour cela que les enfants étaient éduqués. Chaque année, comme les enfants n’avaient pas le même âgé, un ou deux disparaissait subitement du foyer pervers. Le couple maintenait en eux l’espoir d’obtenir une vie de chien meilleure. Peu avant la veille de ses 14 ans, Thorolf demanda à ses maîtres ce qu’aucun autre n’avait osé faire auparavant. Pendant son long séjour, il était celui qui avait montré le plus de signes d’insubordination et de rébellion. En fait, Thorolf exigea de savoir pourquoi les Mésorians détenaient des droits d’esclavage sur leur peuple et surtout, pourquoi pouvaient-ils infliger cela à des enfants. Lilliana entra ce jour-là dans une colère noire et attrapa violemment Thorolf par la gorge en plantant partiellement ses ongles dedans. Si Tristan ne l’avait pas retenue car Thorolf représentait un long investissement pour être gâché maintenant, il y avait fort à parier que Lilliana l’aurait assassiné ce soir-là. Plus serein que son épouse, Tristan usa de la ruse pour tromper le jeune rebelle. Il lui expliqua que les Torkos avaient fait beaucoup de mal aux Mésorians en utilisant des mots qu’un enfant comprendrait et que si son peuple était toujours vivant, c’était parce que les Mésorians étaient tous bons. Il ajouta que les Torkos étaient enclins à faire le Mal autour d’eux et qu’il était du devoir des Mésorians de canaliser ce germe indésirable dès leur plus tendre enfance.

Ainsi, atteignant l’âge fatidique des 14 années, Thorolf fut glissé discrètement sur le marché de l’esclavage. Tristan le vendit à un prix intéressant à l’un de ses partenaires malhonnêtes. Quelques jours plus tard, Thorolf rencontra alors son prochain Maître : Orawyn Mornor. Orawyn était un homme d’une cinquantaine d’année et possédait une demeure dans les quartiers moyens d’Opale. Pour une modique somme, il obtint Thorolf car il était à ses yeux celui qui supporterait le mieux les efforts physiques à venir. En effet, Orawyn tenait l’une des quelques forges de la ville et comme bon nombre de ses concitoyens, il s’était laisser tenter de faire l’acquisition de quelques esclaves afin d’améliorer sa production et par conséquent, ses revenus. Cependant, il n’était pas un mauvais homme et ne considérait pas les Torkos comme des moins que rien.

« Ne pourra posséder un esclave qu’un maître pouvant le nourrir et le loger. Les esclaves devront avoir accès à des conditions sanitaires permettant de limiter la propagation de maladie, et pourront demander les soins en cas de maux divers. En cas de désobéissance, un maître sera en droit de donner du fouet à l’esclave pour le remettre dans le chemin de la discipline. Les punitions ne pourront cependant pas être données sans motif. La maltraitance, comme le meurtre d'esclave, seront considérés comme des crimes aux yeux des lois Mésoriennes. En signe de possession, le Mésorian attache une médaille marquée du signe ou du nom de sa famille au bracelet d'esclavage du Torkos. Ainsi, lorsqu'un Torkos change de maître, il change de médaille. »

Evidemment, Tristana et Lilliana n’avaient pas enseigné ces trois commandements à Thorolf afin de se protéger eux-mêmes aux yeux de la loi et dès ce jour-là, il réalisa qu’il existait peut-être des Mésorians honorables et d’autres qui ne méritaient pas leurs possessions à l’égard de la loi. Sans plus tarder, Orawyn intégra Thorolf à sa famille. Il avait une femme du nom d’Irma âgée de 43 ans et une fille du nom de Louane âgée de 19 ans. Le Mésorian expliqua à son jeune esclave qu’il travaillerait avec lui à la Forge tous les jours et qu’il obtiendrait un jour sa liberté s’il se comportait bien et travaillait bien pour son compte. Il ajouta aussi que le Torkos présent avant lui reçut sa liberté à l’âge de 24 ans. N’ayant pas vraiment d’autres choix, Thorolf accepta donc de porter son bracelet d’esclave en nourrissant ses espoirs de devenir un jour libre et heureux.

Dès le lendemain, sur une plage de temps de sept jours, il travailla six jours durant jusqu’à douze heures par jour, dans la forge avec son Maître. Le septième serait accordé comme étant une journée de repos. Comme un véritable forcené, il battit le fer à la sueur de son front et créa selon les instructions d’Orawyn plusieurs centaines d’armes pour l’Armée d’Opale. En effet, Orawyn possédait un contrat qui ne datait pas d’hier avec le Mâss. Sous la difficulté de l’effort physique, le corps de guerrier de Thorolf commença à se sculpter au fil des mois. Avec l’expérience engendrée, Orawyn montra à son « apprenti-esclave » plusieurs techniques et ensemble, ils cherchaient à améliorer de plus en plus la qualité de leur entreprise pour mettre la concurrence au fond du trou. Orawyn ne pouvait pas considérer Thorolf comme son fils mais il se sentait pris d’affection pour lui au fil du temps. Pendant trois ans, Thorolf forgea son avenir dans les flammes. En effet, il commença à éprouver un réel intérêt pour ce métier-là et davantage pour le feu. Que faisait-il alors de son jour de repos ? Il le passait la plupart du temps à la maison avec Louane lorsque cette dernière n’étudiait pas. D’un naturel curieux, Thorolf se demandait comment vivaient les Mésorians et ce qui était intéressant, c’était que Louane avait seulement cinq ans de plus que lui. Non, non, il ne s’agissait pas vraiment d’une attirance sexuelle ou psychique, Thorolf admirait seulement Louane parce qu’elle avait un âge qu’il atteindrait avec encore un peu de patience. Une simple complicité naquit alors entre eux et Thorolf engrangea de nombreuses connaissances sur le peuple qu’il servait aujourd’hui grâce à elle. Pour l’anniversaire présumé de ses 19 ans, Orawyn décida de faire à Thorolf un cadeau très particulier. Lors d’un jour du repos, Orawyn l’emmena exceptionnellement sur leur lieu de travail afin d’y faire forger une arme pour lui. Ils y passèrent la journée et en revenant à la maison le soir, Thorolf portait dans son dos sa première Epée Large.

La même année, une nuit d’automne, quelqu’un parvint à s’introduire dans la forge et dégrada considérablement les lieux. Visiblement, il s’agissait de quelqu’un qui souhaiter voir le commerce honorable d’Orawyn s’effondrer. Piochant dans leurs réserves, la famille du forgeron parvint à réparer à et à remplacer ce qui avait été endommagé mais cette perte sèche représentait un trou béant dans cette affaire. Orawyn et Thorolf décidèrent donc de consacrer leur jour de repos commun à travailler pour tenter de refermer cette plaie encore surmontable. La ténacité d’Orawyn ne fut cependant pas récompensée car un beau matin, sur le chemin du travail, il fut agressé par plusieurs hommes encapuchonnés sans pouvoir définir dans la précipitation s’il s’agissait de Torkos, de Mésorians ou même d’Okanakis. On lui balafra ce matin-là le visage et on lui coupa l’index gauche en guise d’avertissement. Visiblement, ce n’était pas suffisant car cela ne découragea aucunement Orawyn. En début d’année suivante, les fauteurs de trouble récidivèrent de façon plus cruelle car ils amputèrent d’une jambe et d’un bras le modeste forgeron. Condamné à un long repos, il laissa pendant deux ans Thorolf seul à la forge pour continuer de faire fonctionner son commerce… en vain. En effet, les revenus étaient devenus insuffisants et Orawyn n’eut d’autre choix que de fermer sa boutique. Dans le besoin, il fit également le choix de trahir les espoirs de Thorolf et de le vendre à quelqu’un de bien plus riche que lui afin de sauver sa famille de la misère promise avant de trouver une autre solution. Ce jour-là, quelque chose se brisa dans le cœur de Thorolf et cela le changea indéniablement à jamais.

Bellansor Andonel était un très riche marchand qui vivait dans des quartiers avoisinant ceux du Mâss. Après la pauvreté et la vie moyenne, le jeune homme allait rencontrer le domaine des riches et de ceux qui contrôlaient le monde d’Archipel avec leurs règles et surtout, leur richesse. Bellansor était quelqu’un capable d’obtenir presque tout dans la légalité et lorsque cela ne suffisait pas, il usait d’une ou deux identités cachées de la loi dans les marchés noirs d’Archipel. Il possédait des commerces, des étalages, des auberges et d’autres services à travers les grandes villes d’Archipel. Il n’y avait rien qui ne lui faisait plus plaisir si ce n’était de posséder quelque chose de nouveau. Il existait donc bel et bien une raison pour laquelle le riche marchand avait jeté son dévolu sur Thorolf. A 21 ans, il était déjà l’un des Torkos les plus massifs et impressionnants de sa génération. Chaque année et ce depuis fort longtemps, il se déroulait au Domaine d’Epieux un festival dans lequel des Torkos concourraient pour leurs maîtres. Bellansor faisait participer depuis un moment des esclaves mais aucun d’entre eux n’avait encore arraché le grand prix. Pour Bellansor, il s’agissait d’un petit détail qui le faisait peu frémir mais quant à Thorolf, il s’agirait alors d’un objectif très important. Bien entendu, les mots de Bellansor étaient du poison aux oreilles de Thorolf et il n’avait aucune raison de le croire après ce qu’il considérait comme étant la trahison d’Orawyn. Bellansor jaugea alors Thorolf et après une longue discussion, il parvint à le convaincre de parler librement. En apprenant que Thorolf devint un esclave dans l’inégalité auprès du couple de joaillier et son affection pour ses précédents maîtres, Bellansor fut alors capable d’adapter son discours. Il se présenta comme quelqu’un qui cherchait à lutter contre ces injustices-là avec ses lourds moyens et ses relations privilégiées auprès du Mâss. De même, il expliqua à Thorolf les réelles origines de son peuple. Arrivés sous les ordres du Dieu-Ours Bersok, ils tombèrent face aux Mésorians et les survivants furent réduits à l’esclavage au lieu d’être sommairement exécutés. Il ajouta que si la situation n’avait pas encore changé aujourd’hui, c’était parce que les Mésorians parvenaient à empêcher avec leurs lois la création de mouvements rebelles et efficaces à la fois contre le gouvernement d’Archipel. Il termina en disant à Thorolf que s’il voulait vraiment devenir libre, il devrait se comporter comme un véritable Torkos et gagner sa liberté dans le sang et la gloire au Festival d’Epieux. Ainsi, une nouvelle et toute dernière fois, Thorolf devint à nouveau l’esclave d’un nouvel homme sensiblement sensé et responsable. A l’époque, il ne savait pas encore comment l’expliquer mais quelque chose en Bellansor intriguait et suscitait une certaine admiration. En fait, Bellansor obtenait ce qu’il voulait avec sa seule volonté et c’était vers ce genre d’homme que le cœur meurtri de Thorolf aspirait à devenir.

La première année, Bellansor emmena alors Thorolf au Festival d’Epieux en tant que spectateur car il était déjà trop tard pour s’inscrire lorsqu’il l’acheta à Orawyn. C’était la première fois que Thorolf quittait vraiment la ville d’Opale et il sentit alors un premier sentiment de liberté. Ils empruntèrent la Mer Courbée et la Mer du Trident pour gagner les rivages du Domaine d’Epieux en quelques jours seulement. Thorolf, anciennement forgeron en devenir, se sentait excité à l’idée de fouler cette terre riche en chaine de montagnes et en minerai. Il fut également surpris par le changement de température et de climat très différent de ce qu’il avait connu jusqu’à aujourd’hui. D’un œil intéressé, Thorolf suivit alors le déroulement du Festival d’Epieux et réalisa alors que son rang social était sur le point d’évoluer car il s’agissait d’une joute réservée aux Escortes Torkos. Le jeune homme s’imagina alors pouvoir un jour remporter ce tournoi et embrasser sa liberté comme le lui demandait Bellansor. D’un rang d’observateur, Thorolf retint les visages et les techniques de combat de ceux qu’il affronterait l’année suivante.

De retour dans la Demeure de Bellansor, ce dernier proclama donc Thorolf comme étant son Escorte. Il lui rendit par conséquent son Epée Large qu’il avait conservé dans ses biens et donna à Thorolf les moyens de s’entrainer efficacement au combat. Faisant jouer ses relations et son argent, Bellansor dégota à Thorolf un ancien Capitaine de la Garde d’Elite du Mâss afin de l’entrainer régulièrement au combat. Face à un vétéran tel que Laranel, la courbe de progression du Guerrier Torkos en devenir fut très intéressante à suivre. Evidemment, Thorolf ne remporta pas le premier Festival d’Epieux l’année suivante et tomba dès le premier tour face à Kräll Thorrog, un autre Escorte appartenant à une personnalité de Belhovre. Kräll deviendrait au fil des années le plus grand rival de Thorolf, de sept ans son ainé et surtout, son meilleur ami. D’années en années, Thorolf devint plus robuste, plus fort, plus puissant, plus… Torkos. Il apprit que les limites pouvaient être brisées et que chacun était vraiment maître de son destin si on s’en donnait les moyens. Tous les ans, il retrouvait dans la joie et la bonne humeur Kräll Thorrog et Festival d’Epieux sans forcément s’affronter au cours du tournoi.

Inlassablement, Thorolf devint une véritable bête de combat et se glissa sans mal à l’aube de la trentaine d’années au moins dans les quarts de finalistes à chaque participation, de quoi ravir Bellansor car aucun de ses précédents esclaves n’était parvenu à aller aussi loin. Cinq ans plus tard, à l’âge de 35 années, Thorolf obtint alors sa place tant rêvée en finale du Festival d’Epieux face à… Kräll Thorrog ! Le rêve d’un d’entre eux était sur le point de s’accomplir et intérieurement, les deux rivaux avaient rêvé depuis des années de se trouver dans un tel face à face. Kräll savait qu’il avait effectué la majorité de ses participations et qu’un jour, il devrait s’arrêter car il ne serait plus capable de tenir face à la fougue de la jeunesse grandissante.  Ainsi, un long duel s’engagea entre Kräll et Thorolf et dans l’esprit de chacun était encrée la règle du premier sang. Cependant, chacun d’entre eux avait soif de gloire, de sang et de conquête. Des instincts primaires étaient en train de surgir et de se décupler à chaque fois que le fer se croisait une nouvelle fois entre les deux rivaux d’hier. Avec l’expérience, Kräll obtint le premier sang sur Thorolf mais d’un regard complice et avant que les autorités n’annoncent le grand gagnant, Kräll ne leva pas les bras pour hurler sa gloire promise. Les deux Guerriers Torkos décidèrent que le dernier debout serait le véritable vainqueur de leur vieille rivalité. Evidemment, ce manquement au règlement provoqua une grande polémique et malgré l’hésitation ambiante, les deux maîtres respectifs exigèrent que cet « après-tournoi » ait lieu. Ainsi, après une bataille féroce et dans un bain de sang, Kräll s’effondra face à Thorolf. Thorolf se tourna alors vers les autorités et demanda à ce que le règlement Mésorian soit appliqué afin de permettre à Kräll de bénéficier de sa victoire au premier sang.

En quelque sorte, Thorolf s’était libéré de ses chaines et avait prouvé de manière effrontée à Bellansor qu’il était capable d’aller au-delà des lois. « Il n’y a que des Choix et des Conséquences. » Les conséquences en question ne tardèrent d’ailleurs bientôt pas à tomber. De retour au Domaine de Bellansor, son personnel isola Thorolf dans une pièce obscure et le frappa sous ses yeux plein de colère envers l’affront de son Escorte. Trente coup de fouet plus tard, le dos marqué et ensanglanté, Thorolf se releva et désarma l’un d’entre eux. Non, il ne serait jamais plus le serviteur de personne. Non, il n’accepterait plus le destin des Torkos. Oui, il détesterait les esclavagistes Mésorians et tous ceux qui s’opposeraient à ces idéaux. Oui, il deviendrait un Torkos libre de ses pas, de ses actions et de sa parole sans crainte de représailles. Il n’y avait pas de Berserker en lui ni même de foi ou de dévotion envers Bersork. Non, il allait renier le passé de son peuple et provoquer sa propre gloire à la sueur de son front. Il utiliserait à son bon escient tout ce qu’il avait appris jusqu’à aujourd’hui pour vivre dans un monde où il deviendrait Hors-la-Loi aux yeux de la Justice Mésorianne. En effet, sans la moindre hésitation, Thorolf exécuta Bellansor et sa suite. Il prépara en toute hâte quelques affaires et s’enfuit de la Demeure du riche défunt. Les autorités furent alertées du méfait de Thorolf par une gouvernante de Bellansor mais ne parvinrent pas à rattraper son avance. Recherché mais libre, fier de lui et la nouvelle vie qui allait s’offrir à lui, Thorolf s’enfuit alors de la Cité d’Opale.

Le chemin de Thorolf le mena alors jusqu’au Mont Englouti. Il ne le savait pas encore mais il y reviendrait par la suite à de nombreuses reprises. Le crime de Bellansor n’arrangerait pas la Noblesse Mésorianne et il savait qu’on le traquerait jusqu’aux confins d’Opale. Les premières semaines, le Mont Englouti représenta alors une bonne cachette avec une verdure très dense sur ses flancs. Loin des marchés de la ville, il apprendrait aussi à vivre en milieu sauvage et donc, à survivre dans des conditions peu engageantes. Pendant quelques temps, Thorolf tourna en rond sans vraiment savoir quoi faire. La solitude le pesait déjà et son cœur ne pouvait se résoudre à devenir un simple fuyard jusqu’à la fin de ses jours. Qu’était-il advenu de Kräll Thorrog ? Il représentait pour l’instant sa meilleure piste mais il ne voyait pas comment atteindre Belhovre à pied sans se faire arrêter. La navigation était encore moins une bonne idée. Il fallait alors obtenir une monture solide, appropriée pour le colosse qu’il était devenu et si possible, une monture capable d’emprunter la voie des cieux pour traverser les zones sensibles.  Réunir toutes ses conditions semblait être impossible et sa seule opportunité était de fouiller cette jungle luxuriante. Thorolf s’engouffra alors dans ses profondeurs et au bout d’un moment, il eut l’impression d’être épié par quelque chose que son œil ne pouvait observer distinctement dans les ombres crées par les feuillages omniprésents. Il suivit alors cette trace peut être provoquée uniquement par son esprit. Fouillant dans un endroit un peu escarpé et rocheux, Thorolf tomba nez à nez avec l’entrée d’une grotte sombre et prenant son courage à deux mains, il s’y engouffra. Il heurta alors un objet au sol et tomba lourdement sur le ventre, sentant en même temps une étrange chaleur sur son pied droit. Il ramassa alors l’objet et découvrit qu’il était alors en possession d’une Pierre de Feu. Il déduisit par conséquent qu’il n’était peut-être pas le premier à avoir essayé de s’aventurer dans cette grotte. Trouvant un branchage, Thorolf improvisa une grotte et constata alors le chemin sinueux sur lequel il s’était engouffré avec des vides par ci par là. Des ponts de roche semblaient pouvoir s’effondrer à tout instant et le précipiter dans les abysses. Finalement, après une demi-heure de marche à travers le Mont Englouti, Thorolf déboula sur une sorte de clairière où il tomba nez à nez avec une créature bien étrange. Ni un loup, ni un renard mais une sorte de canidé de grande taille. C’était donc ce jour-là que Thorolf obtint son Kaasar de l’Ombre à qui il donna le nom de Chazo.

Son premier partenaire découvert, Thorolf traversa à vive allure l’île d’Opale afin d’atteindre la frontière. Chazo ne lui permettrait peut-être pas de voler mais il ne s’attaquerait pas seul à une petite embarcation isolée pour la dérober et faire son trajet sur l’Île Jumelle de l’Ouest. Il tomba sur un petit navire de pêcheur et lorsqu’ils virent Thorolf et le reconnurent par rapport aux avis de recherches sur sa tête, ils préfèrent ne pas provoquer sa colère et le laissèrent partir avec l’embarcation. Thorolf et Chazo débarquèrent alors à quelques kilomètres au sud de Belhovre et mirent le feu à l’embarcation afin d’effacer toute trace et en même temps, se faire remarquer au loin. L’île devait savoir qu’un Hors-la-Loi dangereux venait d’accoster et cela remonterait probablement jusqu’aux oreilles de Kräll. Finalement, les deux compères se retrouvèrent soixante-trois jours plus tard dans une petite bourgade à l’Ouest de Belhovre. L’Escorte vaincu par Thorolf au Tournoi d’Epieux traita son ami de fou à lier et lui reprocha son absence de nouvelles et lui demanda si les nouvelles à son sujet étaient fondées. Bien entendu, Thorolf acquiesça et il chercha à convaincre Kräll de le rejoindre. Malheureusement, il n’était pas encore aussi belliqueux de Thorolf et montra d’abord un signe de refus car sa condition d’esclave Torkos dominait encore son esprit. Une petite discute éclata alors entre les deux amis et Thorolf décida alors de faire un choix radical qui forcerait Kräll à faire le choix de sa vie. Volontairement, Thorolf attira l’attention du poste de garde du coin avec la fervente intention de se battre contre eux en infériorité numérique. Kräll avait désormais un choix important à faire. Défendre Thorolf et devenir un Hors-la-Loi comme lui ou alors le laisser à son triste sort et abandonner son vieil ami. Face au zèle de Thorolf et sa détermination, il fit finalement le choix de le rejoindre dans la mêlée et d’embrasser à son tour sa liberté. Le lendemain matin, Thorolf et Kräll avaient disparu et il ne resterait alors plus qu’une dizaine de cadavres de gardes Mésorians sur la place centrale qui se noyaient dans une mare de sang : Cette nuit-là, les Terres de Sang de Thorolf et de Kräll étaient nées.

Pendant cinq ans, Thorolf et Kräll voyagèrent dans les îles du Nord à la recherche de soutien pour rejoindre leur cause Torkos. Difficilement, Kräll accepta que Thorolf soit leur leader naturel mais même s’il ne le lui avoua encore jamais, il reprochait à Thorolf de lui avoir laissé le titre de vainqueur au Festival d’Epieux lorsqu’ils combattirent en finale. Son honneur avait été souillé par Thorolf et il ne se sentait pas glorieux comme il l’avait espéré toutes ces années. Il s’agissait-là d’un reproche qu’il gardait au plus profond de lui-même car en dehors de cela, il reconnaissait absolument tous les autres talents de son frère d’arme. Vers l’âge de 40 ans, Thorolf se rendit seul dans la Chaine des Epieux tandis que Kräll prit la route des Plaines de Givre. Ils avaient déjà rencontré du monde, obtenant par-ci par-là des promesses de Hors-la-Loi qui les rejoindraient le moment venu. Thorolf fit la rencontre dans la Chaine des Epieux de Roselda Azdora, alors âgée de 23 ans. Elle était survoltée, un peu givrée et zélée mais surtout, elle vivait seule dans cette nature hostile. Elle prétendait être née pour une raison ou une autre sur l’île de Mort-Dragon mais les gens ne la croyaient jamais. Toute sa vie, elle avait maladroitement tenté de trouver un groupe mais son instabilité n’incitait personne à lui accorder sa confiance, même malgré les groupes de Hors-la-Loi de la région. Là où elle passait, il y avait très souvent des problèmes qui la suivaient. Thorolf décida alors de prendre Roselda sous son aile et lorsqu’elle lui demanda quel était son nom de famille, il répondit qu’il n’en avait aucun. La jeune guerrière Torkos lui répondit alors que « Grinar » serait un nom qui lui irait bien à l’avenir et qu’il lui faisait penser à un Loup Gris solitaire en quête de compagnons. Sans aucune promesse d’engagement, Thorolf et Roselda s’abandonnèrent à leurs pulsions sexuelles refoulées cette nuit-là l’un à l’autre autour d’un feu de camp dans une caverne du coin sur une peau de bête. Aucun sentiment amoureux ne naquit cette nuit-là mais d’une façon ou d’une autre, ils lièrent leurs destins à jamais.

De son côté, Kräll revint vers Thorolf et Roselda en très charmante compagnie. Kaliga Tekmiss, une affranchie qui vivait à Givregöor, guerrière plus expérimentée que Roselda. Cela s’expliquait par son âge s’élevant alors à 29 ans à ce moment-là et son plus grand vécu en communauté. Domestique dans sa jeunesse puis Escorte, elle obtint alors sa liberté auprès de son ancienne Maîtresse peu avant son décès et vivait depuis lors sans réelle raison de vivre à Givrevöor. Kräll aurait alors fait sa rencontre dans les Plaines de Givre en lui apportant son aide face à un Rhindur et lui sauvant par conséquent la vie. Elle est alors devenue une forme de sagesse pour le groupe des Terres de Sang, ce chainon minoritaire mais nécessaire pour empêcher les instincts bestiaux de ce groupe Torkos de prendre le dessus sur leur raison. Pendant les cinq dernières années, Thorolf, Kräll, Roselda et Kaliga continuèrent leur voyage commun cette fois-ci en direction du Sud des Archipels. Prenant le nom des Terres de Sang, une campagne de recrutement commença à droite à gauche et de temps en temps, ils s’appliquèrent à ce que leur nom commence à se faire connaître par des actes jugés intolérables par les autorités : Mise à feu de champs de blés et de cultures de maïs, bruler des fermes et incendier des ports, attaques répétés sur des patrouilles, enlèvements avec rançons exigées, attaques sur des petits villages pour y inspirer la crainte et la peur, etc. En comptant quelques pertes régulières, le nombre de membres des Terres de Sang s’élevait en moyenne à une vingtaine de pertes.

En l’an 1650, Terres de Sang était alors devenu un groupuscule controversé au sein de tous les peuples. Certains soutenaient leur façon de faire et au contraire, bien d’autres la dénonçaient. Devant cette notoriété grandissante, le Chef de Guerre, Thorolf « le Loup Gris » Grinar des Terres de Sang, ne pouvait plus se contenter d’une petite forme de terrorisme amateur, de banditisme. Son être tout entier réclamait plus, beaucoup plus et avec tout le soutien de Roselda et malgré les avertissements répétés de Kaliga, Thorolf tendait à incarner dans quelques années l’ennemi publique numéro un des Archipels. Il se souvient alors de l’endroit où il fit la rencontre de Chazo, son Kaasar de l’Ombre et décida que les Terres de Sang y installeraient leur repaire principal là-bas, perdu aux yeux du monde dans le Mont Englouti. En effet, cette clairière cachée était le lieu idéal pour y construire un campement et y installer une petite hiérarchie. Aujourd’hui, le Mâss d’Opale semble être une cible de choix pour les Terres de Sang. Qui se douterait qu’un vieux Loup Gris se cacherait dans l’Ombre de son domaine, prêt à bondir sur lui à la moindre occasion ?